L’exposition Rodin-Giacometti, l’occasion de découvrir ce qui se cache derrière les œuvres

L'exposition sur Rodin et Giacometti, dans les salles de la Fondation Mapfre à Madrid, jusqu'au 10 mai, commandée par les Français Catherine Grenier et Hugo Daniel, est un exemple d'une manière de montrer des expositions et des musées où l'explication devient importante de ce qui est derrière les œuvres et ne repose pas seulement sur leur pure exposition. Ce regard progressif sur l'art, initié par les Scandinaves dans les années 60 et 70, permet l'audace d'engager deux grands sculpteurs d'une des grandes périodes de l'art universel, la fin du XIX et les premières années du XX, dans une confrontation intellectuelle, malgré la différence de soixante ans entre eux et le fait qu'ils ne se soient jamais rencontrés. Et aussi sans qu'il soit nécessaire de fonder cette conversation sur l'échantillon de gros morceaux. Le résultat est magnifique. La carrière de Rodin Rodin est sans aucun doute l'un des grands sculpteurs modernistes, chez qui la beauté statique du classicisme disparaît au profit de l'expression des sentiments et du mouvement. Sa grande œuvre Los burgueses de Calais -1889- dont un plâtre est ici exposé, est une véritable démonstration de l'utilisation de la sculpture de groupe non comme un tout mais comme l'expression d'un ensemble diversifié d'expressions qui viennent de l'intérieur. Giacometti Giacometti, qui avait étudié avec Antoine Bourdelle, lui-même disciple de Rodin, avait déjà beaucoup d'art en lui en tant que fils de peintre et frère d'artistes. Lorsqu'il déshabille la figure humaine jusqu'au squelette, il a bien su lâcher le sentiment au lieu de le réprimer. En éliminant tous les accessoires, ses pièces sont non seulement éthérées mais aussi intemporelles. Tous deux travaillent avec élégance le mouvement du corps humain comme on ne l'avait pas fait auparavant et ont des pièces du même titre L'Homme qui marche , l'énergique de Rodin et l'insécurisant de Giacometti. Tous deux ont utilisé le piédestal pour mettre en valeur des aspects de leur travail et ont travaillé à plusieurs reprises avec des pièces d'art ancien égyptien, grec et romain, comme nous pouvons le voir dans l'exposition. On dirait qu'ils représentent leur propre vie. Rodin était un gagne-pain qui épousa Rose Beuret, sa compagne - et aujourd'hui on dirait une bonne - toute sa vie à la fin de son existence, alors qu'il s'occupait de divers amants et subjuguait la toute jeune Camille Claudel, un magnifique sculpteur, qui avait difficultés à montrer son énorme capacité créatrice, sous le joug physique et moral de l'enseignant. Giacometti, cependant, était triste, il suffit de voir tous ses portraits et sa tristesse est sortie par les pores de ses sculptures. Sa vie privée était calme bourgeoise et ennuyeuse. Il attendit d'avoir 48 ans pour épouser Annette Arn et dès lors elle fut son modèle féminin. Bien qu'il n'ait pas vécu longtemps dans sa Suisse natale, il la visita fréquemment et y mourut à Coire en 1966. En complément de la Fondation Canal sur la Plaza de Castilla, des dessins et coupures de presse de Rodin sont visibles jusqu'au 3 mai, avec lesquels il expérimente des mouvements dans l'espace qui conduiront plus tard à la sculpture.

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